FLO: La voix du rap féminin de Guadeloupe à Miami

- Advertisement -

FLO, artiste guadeloupéenne issue de la scène rap/Hip hop vivant à Miami nous offre son premier album  » A long Time Coming » qu’elle choisit de lancer en Guadeloupe. La jeune femme partie en 2001 en Floride à Orlando pour des études de marketing, s’installe à Miami et fait parallèlement évoluer sa musique. Son riche parcours, ses rencontres décisives, ses opportunités déterminantes sur le sol américain rendent FLO incontournable dans le game tant aux USA qu’aux Antilles. FLO est également une artiste militante qui assure la transmission culturelle Guadeloupéenne auprès de la jeunesse américaine. J’ai eu la chance de rencontrer cette rappeuse talentueuse et émérite. Place à l’entretien !

Pourquoi FLO?

Ce pseudo est issu de mes années lycée, période à laquelle j’ai commencé la musique. Je cherchais à ce moment un pseudo et un ami m’a dit « Sista tu as le flow », et c’est comme ça que j’ai choisi Sista Flo. Arrivée aux USA, mon prénom était compliqué à dire pour les américains, du coup tout le monde m’appelait FLO, et c’est resté,  j’ai supprimé le « Sista ».

Comment s’est passée ton adaptation aux Etats-Unis en 2001?

L’adaptation n’a pas été simple tout le temps, mais j’avais eu la chance d’avoir voyagé aux States plus jeune donc je connaissais un peu le fonctionnement des universités, je jouais au basket, avec ma passion pour la musique, j’évoluais dans la culture hip hop, et j’affectionnais déjà beaucoup la langue anglaise. Autant d’éléments qui m’avaient familiarisé avec la culture américaine. Mes parents étaient un peu plus frileux lorsque je leur ai soumis mon envie de partir étudier là-bas, je souhaitais en réalité partir à New-York ou en Californie, mais j’ai dû faire le compromis de la Floride, étant plus proche de la Guadeloupe.

©SystemLife

 Et ton intégration musicale ?

Durant mes études à UCF (University of Central Florida) á Orlando, j’ai eu la chance de faire de bonnes rencontres avec des vétérans de la scène Hip Hop, c’est comme ça que j’ai sorti ma première mixtape « Aflowdiziak » avec X de TDP. J’ai aussi rencontré Walshy Fire de Major Lazer qui mixait á l’époque aux soirées caribéennes, on avait un bon petit groupe d’amis je me suis bien intégrée á la communauté caribéenne. C’est á ce moment que j’ai commencé aussi á bosser avec Reedan et Gwadayouth Ent. qui commençait à s’occuper de mon management. A ce moment, je rappais plutôt en français et créole, mais le public adhérait á l’exotisme de la chose je suppose lol La transition d’Orlando á Miami était plutôt cool aussi, c’est á ce moment que je me suis plus rapprochée de la communauté haïtienne… Petit á petit, j’intégrais l’anglais dans mes textes, jusqu’á ce que ça devienne de plus en plus naturel. Car c’est une chose de parler anglais, mais chanter/rapper et avoir son flow en est une autre !

Ta vie aux USA a directement impacté l’évolution de ta musique ?

Complètement. Avant de partir aux States j’étais dans pas mal de groupes d’abord mon duo fraternel Incognitwo avec Enigma, puis le DSI (Dark Side Island) avec entre autres Riddla, Thyeks ou Maniac, K’fey et la BIP d’ailleurs j’en profite pour faire un gros big up á MCV, XXL, Secundo, Stan, Rakno et tous mes autres frères de son! En arrivant aux USA, j’ai clairement développé mon moi en tant qu’artiste solo. Et puis d’y vivre, m’a rapproché de la source même du Hip Hop, beaucoup de concerts et rencontres qui ont fait évoluer mon style.

En 2007, tu as été choisie pour participer au Cypher* (freestyle) des BET Awards au côté du rappeur Cassidy ou DJ Premier entre autres. Est-ce qu’une telle prestation télévisuelle propulse? Il y a t-il eu un avant/ après BET Awards?

C’est indéniable. Aujourd’hui, il y a encore des personnes qui me reconnaissent suite à cette performance vue par  plus de 60 millions de téléspectateurs (avec les rediffusions). C’est une véritable carte de visite! Il y a des rappeurs américains talentueux et reconnus qui n’ont jamais atteint ce stade. De plus, j’ai été la première francophone à me produire sur cette chaîne internationale donc j’ai la fierté d’avoir ouvert la voie à d’autres rappeurs francophones comme Soprano qui s’y est produit en 2011. Pour réellement optimiser ce genre d’expérience, il faut une grosse machine derrière soi, c’est donc une expérience qui m’a propulsée à mon niveau à ce moment de mon parcours. (*Voir le Cypher ici)

©Ade

A Miami, tu représentes un « porte-drapeau » de la Guadeloupe, tes connaissances là-bas te surnomment Gwada Flo. Le reportage réalisé par France O te qualifie de « rappeuse militante ». Quelle place cet aspect tient-il dans ton quotidien?

La transmission culturelle se fait naturellement sans que je ne cherche à être ambassadrice. La communauté haïtienne, à travers ses actions culturelles, me donne l’opportunité de faire connaître la culture Guadeloupéenne dans les écoles, je le fais spontanément avec un réel plaisir, de la reconnaissance et beaucoup de fierté.

Avec ton recul quant à ta vie aux États-Unis, as-tu un œil différent sur la Guadeloupe ?

Au niveau de la Guadeloupe, de par notre histoire, nous avons encore du mal à nous intégrer dans l’arc caribéen politiquement, économiquement, cependant l’évolution est palpable et nous avons un puissant potentiel tant dans l’entrepreneuriat qu’au niveau artistique, notre culture est notre Vibranium, Gwakanda forever ! lol Je garde un œil bienveillant envers ma Guadeloupe, d’ailleurs j’y suis toujours revenue pour mes proches bien sûr, mais aussi pour mon attachement á notre culture.

Que conseillerais-tu à un jeune antillais qui souhaite partir avec le rêve de faire une carrière musicale aux USA?

D’être déterminé et de ne pas croire tout ce que l’on voit sur les écrans parce qu’il y a une forte culture du divertissement… La réalité est toute autre. Les américains travaillent d’arrache-pied. Il faut s’accrocher, partir avec un bon plan, s’y tenir tout étant bien flexible !

Ton album  » A Long Time Coming » est riche en terme d’influence et de style. On y retrouve du rap, hip-hop, électro, caribéen, kako. Peux-tu définir le style kako?

C’est un style initié par pas mal de gens avant moi, entre autres Exxòs est le pionnier du genre… Il a, d’ailleurs, composé 11 titres sur mon l’album. Kako fait référence au terme Mawon, un style représentatif du monde dans lequel on vit, une ère où tout se mélange tant géographiquement, humainement que culturellement. C’est une dimension universelle avec les spécificités de nos cultures au centre… C’est la fusion entre musiques électroniques modernes, les musiques du monde et le traditionnel Ka. Sur l’album, on retrouve par exemple le duo avec Dominik COCO qui combine des batteries rock et le rythme Kaladja du Gwo Ka, en plus d’être aussi un titre hommage au maitre Ka Guy Conquet.. Pour moi, c’était le moment d’amener un son plus innovant. L’album a été enregistré à Miami, mixé en Martinique, masteurisé à Atlanta, et j’ai choisi d’être en Guadeloupe pour le lancement, tout ça fait déjà de mon bébé un produit Kako lol.

©Jiovann Felsina

Tu maîtrises parfaitement le Créole, l’Anglais, le français. Il y a t-il des contextes spécifiques qui t’inspirent une langue quand tu écris?

L’utilisation des langues dans mes textes a été une prise de tête pendant un temps. Finalement, dans l’album on retrouve l’anglais et le créole à parts plus ou moins égales, et une touche de français. Je peux dire que l’inspiration dépend en effet du contexte. Aux USA, je suis imprégnée de l’anglais et par référence aux faits de société, l’anglais se présentera instantanément à moi. Je peux écrire en créole et en anglais peu importe l’endroit où je me trouve… j’adore écrire avant ou après les voyages, surtout dans l’avion lol mais  il n’y a pas de règles car tout se passe au ressenti, au feeling de l’instrumental, c’est la musique qui m’inspire la langue finalement.

On retrouve de grosses pointures sur ton opus, comment de telles collaborations ont-elles vu le jour?

Djahibre sur le titre « One Love » est un ami de longue date avec qui j’ai toujours voulu collaborer car il a un timbre de voix que je trouve assez spécial. Quant au featuring avec Dominik Coco « An Rèv An Mwen », c’est Exxòs qui a fait le lyannaj. La collaboration avec Wozan Monza sur « O Lé Répondè », un surprenant mélange de boulagèl et beat box, et le titre avec Jean-Michel Rotin « When You Come Around » sont nés d’une connexion avec Reedan.  C’était vraiment de belles séances studio avec beaucoup d’encouragements.

Quels sont tes objectifs à moyen terme?

Je serai jusqu’au mois d’août en Guadeloupe et en Martinique pour le lancement de mon album aux Antilles. J’ai hâte d’être sur scène, je suis excitée de voir du pays, de rencontrer le public. Je compte aussi développer des produits autour du mouvement « Freemyflo ». Je tiens aussi á réaliser en Guadeloupe ce que j’accomplis dans les écoles aux USA, à savoir travailler avec et me mettre au service de notre jeunesse.

Quel est ton point de vue sur les femmes dans le rap/ Hip Hop et qu’est-ce que tu penses des rappeuses aux Antilles?

D’un point de vue général, le rap game reste une industrie masculine où une femme brille après l’autre, pas toutes en même temps. Après Nicki Minaj, aujourd’hui c’est CARDI B qui est mise en avant, mais je trouve que les choses reviennent un peu plus vers la tendance des années 90 où la palette de styles était variée entre Lauryn Hill, Missy Elliot, EVE ou les plus sexy Lil Kim et Foxy Brown. Il y a pas mal de rappeuses qui coexistent maintenant à un bon niveau telles que Remy Ma, Rapsody, Nitty Scott MC, et les plus connues Nicki ou Cardi… Aussi, il faut dire que l’industrie de la musique n’aime pas investir chez les femmes car il y a beaucoup de dépenses liées à l’esthétisme (cheveux, ongles, vêtements), mais avec une sista au style plus naturel comme moi ils pourraient beaucoup économiser (rires).

Concernant les rappeuses made in Gwada/Nina, je reste à l’affût et il y a une présence encore timide des femmes. J’aimerais qu’il y ait plus de collaborations non seulement entre rappeuses mais aussi entre chanteuses et rappeuses, et rappeurs et rappeuses. So let’s connect !

©systemlife

Peux-tu définir le style fashion de Flo?

Je suis plutôt sportive dans mon style…mais plus ça va plus je dévoile un peu plus la femme classy et sexy que je peux être lol. En ce qui concerne mes clips, mes tenues sont souvent bien appréciées… on dira que je sais m’entourer d’autres artistes talentueux en make up et stylisme (big up Lafée Li-K) qui savent réaliser ma vision, team work ! J’affectionne en fait le mix entre le street wear confortable, la touche féminine, toujours avec de petits éléments roots !

Ton secret de beauté ?

En général je favorise tout ce qui est naturel. J’adore le beurre de Karité que j’utilise « an tout sòs », le savon au charbon végétal est aussi mon go-to pour les tâches et la détox des pores du visage. Je me renseigne de plus en plus sur les huiles essentielles non seulement en terme de beauté mais surtout de santé. Pour les cheveux en ce moment j’utilise les produits « As I Am », mais toutes les girls savent qu’on change de produits régulièrement, pour les cheveux mes huiles préférées sont jojoba, ricin et argan … en local j’ai eu de bons résultats avec les produits « Les p’tits soins de Mam’Zelle ».

L’album de FLO  » A Long Time Coming » est disponible sur toutes les plateformes de téléchargement légales: Itunes, Deezer, Spotify, Google Play.

Pour la suivre:

Facebook – Twitter – Youtube – Instagram – Bandcamp

La Fée Pipelette

Articles récents